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Horace, Odes IV 9 | Éloge de Lollius
dimanche 15 février 2015, par
Ne crois surtout pas qu’ils passeront, ces mots que,né au bord de l’Aufide aux longs échos,en des formes jusqu’alors inouïesje dis, recherchant l’association des cordes.Non, si au Méonien revient le premier rang,5Homère, ne se taisent pas les pindariques,ou de Stésichore les nobles Camènes,et le moindre badinage d’Anacréon,le temps n’a rien détruit. L’amour respire encore10et sont vivantes les ardeurs confiéesà la lyre par l’amante d’Éolie.Ne fut pas seule à brûler pour un adultère,ses cheveux bien coiffés, ses habits cousus d’or,extasiée, et son train royal et son15ni le premier Teucer de son arc cydonienà faire flèche. Ne fut pas unique Iliondans les tourments, ni les combats du granddignes d’être dits par les Muses, ni le fierde terribles blessures pour de chastesépouses et des enfants ne fut le premier.Des héros ont vécu avant Agamemnon,25et même nombreux. Mais tous sont privés des larmes,ignorés, écrasés sous une longuenuit, car leur manquait un poète sacré.Bien peu sépare la lâcheté enterréeet la vertu célée. Non, je ne te tairai30pas dépourvu d’honneur dans mes écrits,je ne permettrai pas que tous tes travauximpunément, Lollius, les lacère le blafardoubli. Tu as un esprit en toute occasion35avisé et, dans les temps favorablesou difficiles, sachant se garder droit,pourfendeur de la vénalité, détachéde l’argent qui ramène tout le reste à soi,et le consul non d’une seule année,mais de toutes les fois où, bon et fiable40juge, il a préféré l’honnête à l’intérêt,rejeté avec hauteur les dons des coupables,des bataillons dressés sur son passagedégageant victorieusement ses armes.Non, posséder beaucoup ne permet pas que l’on45te dise heureux. Plus justement s’empare dunom d’heureux celui qui, s’il a reçu des dieuxdes cadeaux, sait avec sagesse en useret sait endurer une austère pauvreté,et pire que la mort redoute l’infamie,50n’ayant, cet homme, pour ses amis chersou pour sa patrie nulle peur de périr.
Lecture avec le texte latin
Ne crois surtout pas qu’ils passeront, ces mots que,
Ne forte credas interitura quae
né au bord de l’Aufide aux longs échos,
longe sonantem natus ad Aufidum
en des formes jusqu’alors inouïes
non ante uolgatas per artis
je dis, recherchant l’association des cordes.
uerba loquor socianda chordis :
Non, si au Méonien revient le premier rang,5
non, si priores Maeonius tenet
Homère, ne se taisent pas les pindariques,
sedes Homerus, Pindaricae latent
les céennes, d’Alcée les menaçantes
Ceaeque et Alcaei minaces
ou de Stésichore les nobles Camènes,
Stesichoriue graues Camenae ;
et le moindre badinage d’Anacréon,
nec siquid olim lusit Anacreon,
le temps n’a rien détruit. L’amour respire encore10
deleuit aetas ; spirat adhuc amor
et sont vivantes les ardeurs confiées
uiuuntque commissi calores
à la lyre par l’amante d’Éolie.
Aeoliae fidibus puellae.
Ne fut pas seule à brûler pour un adultère,
Non sola comptos arsit adulteri.
ses cheveux bien coiffés, ses habits cousus d’or,
crines et aurum uestibus inlitum
extasiée, et son train royal et son15
mirata regalisque cultus
royal cortège, Hélène de Laconie,
et comites Helene Lacaena
ni le premier Teucer de son arc cydonien
primusue Teucer tela Cydonio
à faire flèche. Ne fut pas unique Ilion
direxit arcu ; non semel Ilios
dans ses tourments, ni les combats du grand
uexata ; non pugnauit ingens
Idoménée ou de Sthénélus les seuls20
Idomeneus Sthenelusue solus
dignes d’être dits par les Muses, ni le fier
dicenda Musis proelia ; non ferox
Hector, ou l’âpre Déiphobe, à recevoir
Hector uel acer Deiphobus grauis
de terribles blessures pour de chastes
excepit ictus pro pudicis
épouses et des enfants ne fut le premier.
coniugibus puerisque primus.
Des héros ont vécu avant Agamemnon,25
Vixere fortes ante Agamemnona
et même nombreux. Mais tous sont privés des larmes,
multi ; sed omnes inlacrimabiles
ignorés, écrasés sous une longue
urgentur ignotique longa
nuit, car leur manquait un poète sacré.
nocte, carent quia uate sacro.
Bien peu sépare la lâcheté enterrée
Paulum sepultae distat inertiae
et la vertu célée. Non, je ne te tairai30
celata uirtus. Non ego te meis
pas dépourvu d’honneur dans mes écrits,
chartis inornatum silebo
je ne permettrai pas que tous tes travaux
totue tuos patiar labores
impunément, Lollius, les lacère le blafard
impune, Lolli, carpere liuidas
oubli. Tu as un esprit en toute occasion35
obliuiones. Est animus tibi
avisé et, dans les temps favorables
rerumque prudens et secundis
ou difficiles, sachant se garder droit,
temporibus dubiisque rectus,
pourfendeur de la vénalité, détaché
uindex auarae fraudis et abstinens
de l’argent qui ramène tout le reste à soi,
ducentis ad se cuncta pecuniae,
et le consul non d’une seule année,
consulque non unius anni,
mais de toutes les fois où, bon et fiable40
sed quotiens bonus atque fidus
juge, il a préféré l’honnête à l’intérêt,
iudex honestum praetulit utili,
rejeté avec hauteur les dons des coupables,
reiecit alto dona nocentium
des bataillons dressés sur son passage
uoltu, per obstantis cateruas
dégageant victorieusement ses armes.
explicuit sua uictor arma.
Non, posséder beaucoup ne permet pas que l’on45
Non possidentem multa uocaueris
te dise heureux. Plus justement s’empare du
recte beatum ; rectius occupat
nom d’heureux celui qui, s’il a reçu des dieux
nomen beati, qui deorum
des cadeaux, sait avec sagesse en user
muneribus sapienter uti
et sait endurer une austère pauvreté,
duramque callet pauperiem pati
et pire que la mort redoute l’infamie,50
peiusque leto flagitium timet,
n’ayant, cet homme, pour ses amis chers
non ille pro caris amicis
ou pour sa patrie nulle peur de périr.
aut patria timidus perire.