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Horace, Odes I 28 | Une seule fois sur le chemin de la mort
jeudi 31 mai 2012, par
Tu voulais mesurer la mer et la terre, et le sable sans nombre,
et tout entier te contient, Archytas,
un peu de poussière près du large Matinus, ce petit présent que
l'on t'a fait et à rien ne te sert d'
avoir sondé les demeures aériennes et parcouru la voûte céleste
de ton intelligence promise à mourir.
Lui aussi s'est éteint le père de Pélops, invité à la table des
dieux, et Tithon enlevé dans les airs
et Minos admis aux secrets de Jupiter, et le Tartare retient le
Panthoïde par deux fois descendu chez
Orcus, malgré le bouclier décroché prouvant qu'il avait vécu au
moment de Troie, et n'avait rien cédé
de plus que ses nerfs et sa peau à la mort noire, lui maître si
brillant, jugeais-tu, de la nature et
du vrai. Mais tous, une seule nuit nous attend, il est à fouler
une seule fois, le chemin de la mort.
Des uns, les Furies font un spectacle pour l'œil torve de Mars,
la mer avide veut la mort des marins,
et se mélangent morts serrés vieux et jeunes, pas une tête dont
se soit écartée la sévère Proserpine.
Et moi aussi le rapide compagnon d'Orion à son coucher le Notus
m'a englouti sous les eaux d'Illyrie.
Toi, le marin, ne sois pas avare, ne refuse pas le sable errant
à mes os, à ma tête sans sépulture un
peu de sable, et qu'à ce prix, quand l'Eurus menacera la mer de
l'Hespérie, les coups portent sur les
forêts de Venouse, te laissant sain et sauf, et que le profit à
flot coule sur toi des sources qui le
peuvent, Jupiter propice, Neptune gardien de la sainte Tarente.
Sans scrupules tu commets cette faute
tes enfants innocents la payeront plus tard et peut-être qu'une
juste punition, un éclatant retour du
sort t'attendent, toi ? Abandonné, ma prière se fera vengeance,
et aucune expiation ne t'en libèrera.
Si pressé que tu sois, c'est peu de retard. Jette trois fois de
la poussière, et tu pourras repartir.
Lecture avec le texte latin
Tu voulais mesurer la mer et la terre, et le sable sans nombre,
Te maris et terræ numeroque carentis harenæ
et tout entier te contient, Archytas,
mensorem cohibent, Archyta,
un peu de poussière près du large Matinus, ce petit présent que
pulueris exigui prope latum parua Matinum
l’on t’a fait et à rien ne te sert d’
munera nec quicquam tibi prodest
avoir sondé les demeures aériennes et parcouru la voûte céleste
aerias temptasse domos animoque rotundum
de ton intelligence promise à mourir.
percurrisse polum morituro.
Lui aussi s’est éteint le père de Pélops, invité à la table des
Occidit et Pelopis genitor, conuiua deorum,
dieux, et Tithon enlevé dans les airs
Tithonusque remotus in auras
et Minos admis aux secrets de Jupiter, et le Tartare retient le
et Iouis arcanis Minos admissus habentque
Panthoïde par deux fois descendu chez
Tartara Panthoiden iterum Orco
Orcus, malgré le bouclier décroché prouvant qu’il avait vécu au
demissum, quamuis clipeo Troiana refixo
moment de Troie, et n’avait rien cédé
tempora testatus nihil ultra
de plus que ses nerfs et sa peau à la mort noire, lui maître si
neruos atque cutem morti concesserat atræ,
brillant [1], jugeais-tu, de la nature et
iudice te non sordidus auctor
du vrai. Mais tous, une seule nuit nous attend, il est à fouler
naturæ uerique. Sed omnis una manet nox
une seule fois, le chemin de la mort.
et calcanda semel uia leti.
Des uns, les Furies font un spectacle pour l’œil torve de Mars [2],
Dant alios Furiæ toruo spectacula Marti,
la mer avide veut la mort des marins,
exitio est auidum mare nautis,
et se mélangent morts serrés vieux et jeunes, pas une tête dont
mixta senum ac iuuenum densentur funera, nullum
se soit écartée la sévère Proserpine.
sæua caput Proserpina fugit.
Et moi aussi le rapide compagnon d’Orion à son coucher le Notus
Me quoque deuexi rapidus comes Orionis
m’a englouti sous les eaux d’Illyrie.
Illyricis Notus obruit undis.
Toi, le marin, ne sois pas avare, ne refuse pas le sable errant
At tu, nauta, uagæ ne parce malignus harenæ
à mes os, à ma tête sans sépulture un
ossibus et capiti inhumato
peu de sable, et qu’à ce prix, quand l’Eurus menacera la mer de
particulam dare, sic, quodcumque minabitur Eurus
l’Hespérie, les coups portent sur les
fluctibus Hesperiis, Venusinæ
forêts de Venouse, te laissant sain et sauf, et que le profit à
plectantur siluæ te sospite multaque merces
flot coule sur toi des sources qui le
unde potest tibi defluat æquo
peuvent, Jupiter propice, Neptune gardien de la sainte Tarente.
ab Ioue Neptunoque sacri custode Tarenti.
Sans scrupules tu commets cette faute
Neglegis immeritis nocituram
tes enfants innocents la payeront plus tard et peut-être qu’une
postmodo te natis fraudem committere. Fors et
juste punition, un éclatant retour du
debita iura uicesque superbæ
sort t’attendent, toi ? Abandonné, ma prière se fera vengeance,
te maneant ipsum ? Precibus non linquar inultis
et aucune expiation ne t’en libèrera.
teque piacula nulla resoluent.
Si pressé que tu sois, c’est peu de retard. Jette trois fois de
Quamquam festinas, non est mora longa. Licebit
la poussière, et tu pourras repartir.
iniecto ter puluere curras.
Distiques composés d’un hexamètre dactylique suivi d’un quaternaire dactylique,
transposés en vers justifiés 63 + 37 caractères espaces comprises.
[1] Pythagore est le "maître brillant" non sordidus auctor (v. 14) d’Archytas. Je regrette de n’avoir pas réussi à mieux rendre l’expression non sordidus "non vil, sans bassesse".
[2] Le dieu de la guerre est un dieu "à l’œil torve" toruo Marti (souvent traduit par "farouche"). Cette qualification de "l’œil" me paraît faire référence à une apparence du visage des guerriers combattants plutôt qu’à un regard : déformation du visage, rictus ou peintures de guerre, masque destiné à effrayer l’ennemi, pratiques dont le souvenir est peut-être déposé dans l’adjectif (si toruus < torquere "tordre, déformer, torturer").
Messages
1. Horace, Odes I 28 | Une seule fois sur le chemin de la mort, 25 septembre 2024, 17:29
quand a été écrit ce poème ?
1. Horace, Odes I 28 | Une seule fois sur le chemin de la mort, 13 octobre 2024, 09:53, par Danielle Carlès
Il y a deux millénaires.