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Horace, Odes I 12 | Quel homme ? Quel héros ? Quel dieu ?
jeudi 3 mai 2012, par
Quel homme ? Quel héros vas-tu célébrer,sur la lyre ou la flûte aigrelette, Clio ?Quel dieu ? dont l’écho dira et redira paramusement le nom,dans les régions ombragées de l’Hélicon 5dont les forêts impulsivement avaient suivile beau chanteur Orphée,qui suspendait au vol, avec l’art de sa mère,le cours rapide des fleuves, le passage des vents, 10que la douceur sonore de ses cordesfaisait entendre des chênes.Pourrai-je dire un seul mot avant l’habitueléloge du Père qui règle le temps des hommes,le temps des dieux, la mer, la terre, le monde, 15au rythme des saisons ?De lui rien ne s’engendre qui lui soit supérieur,rien n’égale sa puissance, il n’a pas de second.Toutefois, dans le rang des honneurs, Pallasviendra juste après lui. 20Toi qui as osé te battre, je ne te tairai pas,Liber, ni la vierge ennemie des bêtesféroces [1], ni toi, redoutable par ta flècheinfaillible, Phébus.le cavalier et le lutteur, célèbres par leursvictoires. Dès que s’allume aux yeux des marinsleur claire constellation,reflue sur les rochers l’agitation d’écume,tombent les vents, fuient les nuages, et sur la 30mer, à leur volonté, la houlemenaçante se couche.Après, je ne sais pas, évoquer d’abord Romulus ?ou le règne de paix de Pompilius ? l’orgueilla noblesse de sa mort ?de sa grande âme, le jour de la victoire punique,ma Camène avec gratitude rendra un bel hommage,à Fabricius aussi. 40leur valeur guerrière, c’était le fruitd’un sévère dénuement, avoir grandi au domaine ancestral,avec un lare tout aussi frugal.Comme un arbre au rythme obscur du temps 45croît le renom de Marcellus, comme la luneau milieu des feux plus faibles luit entre toutesPère et gardien de la famille des hommes,fils de Saturne, le destin t’a remis le soin du 50grand César, puisses-tu régneravec César en second [3].Quand il aura soumis et mené au cortègedes confins de l’Orient,faible devant toi seul, il sera le juste gouverneur d’un monde prospère.Toi, tu ébranleras l’Olympe sous le poids de ton char,toi, tu jetteras tes foudres contre tes ennemis, contre les violateursde nos bois sacrés. 60
[1] La chasseresse, Diane / Artémis.
[2] À la croissance continue de la gloire de la famille de Marcellus correspond l’image de la lune et des étoiles pour illustrer celle de la famille julienne.
Interprétée littéralement cette image n’est pas si favorable qu’il y paraît pour Auguste : si la lune est Jules César, il se retrouve, lui, parmi les ignis minores, avec l’adjectif retrouvé plus loin, v. 57 : te minor, où il qualifie explicitement Auguste. Rappelons qu’Auguste était le petit-neveu (sa mère était la nièce de Jules) et le fils adoptif de César.
Mais il faut admettre que les deux images peuvent aussi s’interpréter autrement : la croissance de l’arbre ne vise que la gloire du jeune Marcellus et la lune julienne brillant parmi les étoiles est celle d’Auguste.
[3] Les deux Césars nommés ici semblent être le seul et même Auguste. Mais il faut avouer que le "grand César" et le "second César" installent un doute.
On doit comprendre que César sera le second du règne de Jupiter, mais on se souvient qu’au v. 18 Horace nous a dit que Jupiter n’avait justement pas de second. On interprète cette apparente contradiction en disant que, oui, jusqu’à présent c’était vrai, mais maintenant avec quelqu’un comme Auguste, Jupiter va changer d’avis.
Ou alors on peut lire : Le destin t’a remis le soin d’un grand César (le premier), règne (maintenant) avec un second César.