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Horace, Odes IV 1 | Mais pourquoi, ah ! Ligurinus
jeudi 27 novembre 2014, par
Suspendues, Vénus, depuis si longtemps,tu reprends les hostilités ? Épargne-moi, je t’en supplie, je t’en supplie !Je ne suis plus celui que j’étais quand, aimable,régnait sur moi Cinara. Cesse, de la douceurmère implacable des Désirs,5dans mon dixième lustre, de vouloir me plier à ton suaveempire, je suis rebelle à présent. Va-t’enlà où te réclament les flatteuses prières des hommes jeunes.Avec plus de chance dans la maisonde Paulus, à toutes ailes, par la pourpre des cygnes10tu te laisseras guider, la maison de Maximus,si tu cherches à brûler un cœur capable de servir.car il est noble et il a belle allure,et ne reste jamais sans voix pour défendre un accusé angoissé,et jeune, avec d’innombrables talents,15loin il portera tes enseignes en guerroyant pour toi,et quand, un jour, devenu plus puissantque toutes les largesses d’un rival princier, il se rira de lui,auprès des lacs albains il tedéposera, toute de marbre, sous des solives de thuya.20Là, en abondance vers tes narinestu feras monter de l’encens. De la lyre et de la flûte bérécynthiennetu te délecteras,du mélange des chants, et aussi la syrinx.Là, deux fois par jour, des garçons,25accompagnés de toutes jeunes filles, à ta divinitéadressant des louanges, de leur pied innocent,à la manière des Saliens, par trois fois taperont le sol.Moi, ni d’une femme, ni d’un garçon,aujourd’hui, et ni de l’espoir naïf d’un amour partagé,30ni de rivaliser à la boisson, je n’ai plus goût,ni couronner mes tempes de fleurs fraîches.Mais pourquoi, ah ! Ligurinus, pourquoicoule par instant cette larme sur mes joues ?pourquoi, avec tant de faconde, sans honneur35entre deux mots tombe ma langue dans le silence ?C’est que la nuit, moi, dans mes rêves,déjà je t’ai pris, je te tiens, déjà tu voles et je te suisparmi l’herbe du champde Mars, je te suis, ô rebelle, parmi l’eau volubile.40
Lecture avec le texte latin
Suspendues, Vénus, depuis si longtemps,
[4,01,1] Intermissa, Venus, diu
tu reprends les hostilités ? Épargne-moi, je t’en supplie, je t’en supplie !
rursus bella moues ? Parce precor, precor.
Je ne suis plus celui que j’étais quand, aimable,
Non sum qualis eram bonae
régnait sur moi Cinara. Cesse, de la douceur
sub regno Cinarae. Desine, dulcium
mère implacable des Désirs,5
[4,01,5] mater saeua Cupidinum,
dans mon dixième lustre, de vouloir me plier à ton suave
circa lustra decem flectere mollibus
empire, je suis rebelle à présent. Va-t’en
iam durum imperiis : abi,
là où te réclament les flatteuses prières des hommes jeunes.
quo blandae iuuenum te reuocant preces.
Avec plus de chance dans la maison
Tempestiuius in domum
de Paulus, à toutes ailes, par la pourpre des cygnes10
[4,01,10] Pauli purpureis ales oloribus
tu te laisseras guider, la maison de Maximus,
comissabere Maximi
si tu cherches à brûler un cœur capable de servir.
si torrere iecur quaeris idoneum ;
car il est noble et il a belle allure,
namque et nobilis et decens
et ne reste jamais sans voix pour défendre un accusé angoissé,
et pro sollicitis non tacitus reis
et jeune, avec d’innombrables talents,15
[4,01,15] et centum puer artium
loin il portera tes enseignes en guerroyant pour toi,
late signa feret militiae tuae,
et quand, un jour, devenu plus puissant
et, quandoque potentior
que toutes les largesses d’un rival princier, il se rira de lui,
largi muneribus riserit aemuli,
auprès des lacs albains il te
Albanos prope te lacus
déposera, toute de marbre, sous des solives de thuya.20
[4,01,20] ponet marmoream sub trabe citrea.
Là, en abondance vers tes narines
Illic plurima naribus
tu feras monter de l’encens. De la lyre et de la flûte bérécynthienne
duces tura, lyraque et Berecyntia
tu te délecteras,
delectabere tibia
du mélange des chants, et aussi la syrinx.
mixtis carminibus non sine fistula ;
Là, deux fois par jour, des garçons,25
[4,01,25] illic bis pueri die
accompagnés de toutes jeunes filles, à ta divinité
numen cum teneris uirginibus tuum
adressant des louanges, de leur pied innocent,
laudantes pede candido
à la manière des Saliens, par trois fois taperont le sol.
in morem Salium ter quatient humum.
Moi, ni d’une femme, ni d’un garçon,
Me nec femina nec puer
aujourd’hui, et ni de l’espoir naïf d’un amour partagé,30
[4,01,30] iam nec spes animi credula mutui
ni de rivaliser à la boisson, je n’ai plus goût,
nec certare iuuat mero
ni couronner mes tempes de fleurs fraîches.
nec uincire nouis tempora floribus.
Mais pourquoi, ah ! Ligurinus, pourquoi
Sed cur heu, Ligurine, cur
coule par instant cette larme sur mes joues ?
manat rara meas lacrima per genas ?
pourquoi, avec tant de faconde, sans honneur35
[4,01,35] Cur facunda parum decoro
entre deux mots tombe ma langue dans le silence ?
inter uerba cadit lingua silentio ?
C’est que la nuit, moi, dans mes rêves,
Nocturnis ego somniis
déjà je t’ai pris, je te tiens, déjà tu voles et je te suis,
iam captum teneo, iam uolucrem sequor
parmi l’herbe du champ
te per gramina Martii
de Mars, je te suis, ô rebelle, parmi l’eau volubile.40
[4,01,40] campi, te per aquas, dure, uolubilis.