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Virgile, Énéide VI, 679-702 | Énée retrouve Anchise
mercredi 26 octobre 2022, par
Or Anchise Père au fond d’une combe verte
des âmes qui s’y trouvaient enfermées pour ensuite monter vers la lumière d’en haut680
faisait la revue, ce dont il s’acquittait toujours avec zèle, et c’était toute l’armée des siens
que justement il recensait, ses chers neveux,
le destin et la fortune des hommes, leurs mœurs et leurs exploits.
Mais lorsqu’il vit venir vers lui à travers champs
Énée, de joie il tendit ses deux paumes,685
des larmes coulèrent sur ses joues et un cri s’échappa de sa bouche :
« Enfin tu es venu ! Ton père n’attendait pas moins de toi,
ta piété a vaincu les difficultés du chemin ! Il m’est donné de voir ton visage,
mon fils, de t’entendre et de t’adresser les paroles familières !
Oui, c’est bien ainsi que mon cœur l’escomptait, qu’il tablait sur le futur,690
comptant les jours, et mon affection ne m’a pas trompé.
Après quel voyage sur tant de terres, à travers tant d’immenses mers,
je t’accueille, mon fils, soumis à tant de si graves périls !
Combien j’ai redouté le mal que le royaume de Libye pouvait te faire ! »
Mais lui de son côté : « C’est la vision de toi, père, la vision de toi affligé695
ne cessant de se présenter à moi qui m’a poussé à venir jusqu’ici.
La flotte m’attend dans les eaux tyrrhéniennes. Permets que je serre ta main,
s’il te plaît, père, ne te dérobe pas à nos embrassements ! »
Tout en parlant un flot de larmes inondait son visage.
Trois fois il essaya de jeter ses bras autour de son cou,700
trois fois vainement embrassée la vision échappa à ses mains,
à l’instar des vents légers, semblable au sommeil fugace.