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Horace, Odes II 16 | Avec le mépris des envieux vulgaires

mercredi 13 mars 2013, par Danielle Carlès

Le calme, demande au dieux celui qui au large
est surpris sur la mer Égée à l’instant où un nuage noir
ensevelit la lune et que s’éteignent les étoiles
qui guident les marins,

le calme, la guerrière Thrace dans la fureur du combat
le calme, les Mèdes équipés du carquois,
Grosphus, que les pierres précieuses, la pourpre
ou l’or ne peuvent acheter,
 
car ni les trésors, ni un licteur consulaire
ne tiennent éloigné le mal-être tumultueux
de l’esprit et les soucis voltigeant
sous les plafonds à caissons.
 
Mais la vie est bonne avec peu, pour qui voit la splendeur
sur sa table modeste d’une salière héritée de son père
et à qui la peur ou une sordide convoitise
n’ôte pas un doux sommeil.
 
À quoi bon ce courage de viser dans nos vies si brèves
autant de buts différents ? À quoi bon changer pour des terres
chauffées par un autre soleil ? Qui, exilé loin de sa patrie,
se quitte aussi lui-même ?
 
Le souci pervers monte sur les navires blindés de bronze
et ne lâche pas les escadrons de cavaliers,
plus rapide que les cerfs et, poussant devant lui les nuages,
plus rapide que l’Eurus.
 
Que l’âme heureuse pour l’instant déteste s’inquiéter
de ce qui viendra après et les moments amers, qu’un tenace
sourire les modère, le bonheur n’est jamais
en tout point parfait.
 
Une mort précoce en pleine gloire a emporté Achille,
une infinie vieillesse a consumé Tithon,
et qui sait, ce qu’elle t’aura refusé, peut-être l’heure
qui vient me l’offrira-t-elle.
 
Autour de toi cent troupeaux de vaches siciliennes
mugissent, pour toi pousse un hennissement
une cavale de quadrige, toi des laines deux fois teintes
de murex africain
 
t’habillent. Moi, j’ai ma petite campagne et
le souffle subtil de ma Camène grecque,
la Parque sans tromperie m’a fait ce don, avec le mépris
des envieux vulgaires.

Lecture avec le texte latin

Le calme, demande au dieux celui qui au large

[2,16,1] Otium diuos rogat in patenti

est surpris sur la mer Égée à l’instant où un nuage noir

prensus Aegaeo, simul atra nubes

ensevelit la lune et que s’éteignent les étoiles

condidit lunam neque certa fulgent

qui guident les marins,

sidera nautis ;

le calme, la guerrière Thrace dans la fureur du combat

[2,16,5] otium bello furiosa Thrace,

le calme, les Mèdes équipés du carquois,

otium Medi pharetra decori,

Grosphus, que les pierres précieuses, la pourpre

Grosphe, non gemmis neque purpura

ou l’or ne peuvent acheter,

uenale neque auro.

car ni les trésors, ni un licteur consulaire

Non enim gazae neque consularis

ne tiennent éloigné le mal-être tumultueux

[2,16,10] summouet lictor miseros tumultus

de l’esprit et les soucis voltigeant

mentis et curas laqueata circum

sous les plafonds à caissons.

tecta uolantis.

Mais la vie est bonne avec peu, pour qui voit la splendeur

Viuitur paruo bene, cui paternum

sur sa table modeste d’une salière héritée de son père

splendet in mensa tenui salinum

et à qui la peur ou une sordide convoitise

[2,16,15] nec leuis somnos timor aut cupido

n’ôte pas un doux sommeil.

sordidus aufert.

À quoi bon ce courage de viser dans nos vies si brèves

Quid breui fortes iaculamur aeuo

autant de buts différents ? À quoi bon changer pour des terres

multa ? Quid terras alio calentis

chauffées par un autre soleil ? Qui, exilé loin de sa patrie,

sole mutamus ? Patriae quis exul

se quitte aussi lui-même ?

[2,16,20] se quoque fugit ?

Le souci pervers monte sur les navires blindés de bronze

Scandit aeratas uitiosa nauis

et ne lâche pas les escadrons de cavaliers,

cura nec turmas equitum relinquit,

plus rapide que les cerfs et, poussant devant lui les nuages,

ocior ceruis et agente nimbos

plus rapide que l’Eurus.

ocior Euro.

Que l’âme heureuse pour l’instant déteste s’inquiéter

[2,16,25] Laetus in praesens animus quod ultra est

de ce qui viendra après et les moments amers, qu’un tenace

oderit curare et amara lento

sourire les modère, le bonheur n’est jamais

temperet risu : nihil est ab omni

en tout point parfait.

parte beatum.

Une mort précoce en pleine gloire a emporté Achille,

Abstulit clarum cita mors Achillem,

une infinie vieillesse a consumé Tithon,

[2,16,30] longa Tithonum minuit senectus,

et qui sait, ce qu’elle t’aura refusé, peut-être l’heure

et mihi forsan, tibi quod negarit,

qui vient me l’offrira-t-elle.

porriget hora.

Autour de toi cent troupeaux de vaches siciliennes

Te greges centum Siculaeque circum

mugissent, pour toi pousse un hennissement

mugiunt uaccae, tibi tollit hinnitum

une cavale de quadrige, toi des laines deux fois teintes

[2,16,35] apta quadrigis equa, te bis Afro

de murex africain

murice tinctae

t’habillent. Moi, j’ai ma petite campagne et

uestiunt lanae ; mihi parua rura et

le souffle subtil de ma Camène grecque,

spiritum Graiae tenuem Camenae

la Parque sans tromperie m’a fait ce don, avec le mépris

Parca non mendax dedit et malignum

des envieux vulgaires.

[2,16,40] spernere uolgus.


Strophes sapphiques.

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