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Horace, Odes III 6 | Payer pour les fautes de ses aînés

lundi 14 octobre 2013, par Danielle Carlès

Pour les fautes de tes aînés même innocent tu paieras,
Romain, tant que tu n’auras pas restauré les temples,
les maisons chancelantes des dieux et
leurs images dégoûtantes du noir de la fumée.
 
C’est agir par soumission aux dieux qui assure ton empire :
de là vient tout principe, à cela rapporte toute fin.
Les dieux négligés ont donné des maux
sans nombre à l’Hespérie, des raisons de pleurer.
 
Deux fois déjà Monésès et les troupes de Pacorus
lors d’attaques lancées sous de mauvais auspices ont écrasé
les nôtres et se rengorgent d’avoir ajouté
nos dépouilles à leurs minces petits colliers.
 
Occupée à ses propres discordes, ils ont bien failli
la détruire, la Ville, Daces et Éthiopiens, [1]
les uns redoutables par leur flotte, les autres
supérieurs grâce aux flèches de leurs archers.
 
Un siècle fertile pour le mal a d’abord souillé
ses noces, puis ses enfants et ses maisons.
De cette source le désastre a dérivé,
retombant à flot sur la patrie et sur le peuple.
 
La fillette [2] s’amuse à apprendre les danses ioniques,
à peine nubile, à façonner son corps.
Dès maintenant à de sales amours
elle se prépare, dès l’âge le plus tendre.
 
Bientôt après elle se cherche des amants plus jeunes
à la table où boit son mari, et elle ne choisit pas
celui à qui elle va donner à la sauvette
un plaisir non permis loin des lumières,
 
mais on la demande, et devant tout le monde, même
son mari qui sait, elle se lève, un marchand l’appelle,
ou le patron d’un navire espagnol,
prêt à mettre le prix fort pour acheter sa honte.
 
Elle n’était pas née de tels parents, la jeunesse
qui fit prendre à la mer la couleur du sang punique,
qui brisa Pyrrhus et Antiochus
le Grand et le funeste Hannibal,
 
mais c’était la virile postérité de soldats paysans,
qui avait appris avec la houe sabellienne
à retourner la glèbe ou rentrer
sur un ordre de leur austère mère
 
le bois qu’ils venaient de couper, tandis que le soleil
déplaçait l’ombre des montagnes et délivrait du joug
les bœufs fatigués, amenant l’heure
bénie qui voyait son char disparaître.
 
Pernicieux, que ne dégrade pas le temps ?
La génération de nos parents, pire que nos aïeux, nous a fait naître
plus mauvais encore et nous allons donner
le jour à des enfants qui l’emporteront en perversité.

Lecture avec le texte latin

Pour les fautes de tes aînés même innocent tu paieras,

[3,06,1] Delicta maiorum inmeritus lues,

Romain, tant que tu n’auras pas restauré les temples,

Romane, donec templa refeceris

les maisons chancelantes des dieux et

aedisque labentis deorum et

leurs images dégoûtantes du noir de la fumée.

foeda nigro simulacra fumo.

C’est agir par soumission aux dieux qui assure ton empire :

[3,06,5] Dis te minorem quod geris, imperas :

de là vient tout principe, à cela rapporte toute fin.

hinc omne principium, huc refer exitum.

Les dieux négligés ont donné des maux

Di multa neglecti dederunt

sans nombre à l’Hespérie, des raisons de pleurer.

Hesperiae mala luctuosae.

Deux fois déjà Monésès et les troupes de Pacorus

Iam bis Monaeses et Pacori manus

lors d’attaques lancées sous de mauvais auspices ont écrasé

[3,06,10] non auspicatos contudit impetus

les nôtres et se rengorgent d’avoir ajouté

nostros et adiecisse praedam

nos dépouilles à leurs minces petits colliers.

torquibus exiguis renidet.

Occupée à ses propres discordes, ils ont bien failli

Paene occupatam seditionibus

la détruire, la Ville, Daces et Éthiopiens,

deleuit urbem Dacus et Aethiops,

les uns redoutables par leur flotte, les autres

[3,06,15] hic classe formidatus, ille

supérieurs grâce aux flèches de leurs archers.

missilibus melior sagittis.

Un siècle fertile pour le mal a d’abord souillé

Fecunda culpae saecula nuptias

ses noces, puis ses enfants et ses maisons.

primum inquinauere et genus et domos :

De cette source le désastre a dérivé

hoc fonte deriuata clades

retombant à flot sur la patrie et sur le peuple.

[3,06,20] in patriam populumque fluxit.

La fillette s’amuse à apprendre les danses ioniques,

Motus doceri gaudet Ionicos

à peine nubile, et à façonner son corps.

matura uirgo et fingitur artibus,

Dès maintenant à de sales amours

iam nunc et incestos amores

elle se prépare, dès l’âge le plus tendre.

de tenero meditatur ungui.

Bientôt après elle se cherche des amants plus jeunes

[3,06,25] Mox iuniores quaerit adulteros

à la table où boit son mari, et elle ne choisit pas

inter mariti uina, neque eligit

celui à qui elle va donner à la sauvette

cui donet inpermissa raptim

un plaisir non permis loin des lumières,

gaudia luminibus remotis,

mais on la demande, et devant tout le monde, même

sed iussa coram non sine conscio

son mari qui sait, elle se lève, un marchand l’appelle,

[3,06,30] surgit marito, seu uocat institor

ou le patron d’un navire espagnol,

seu nauis Hispanae magister,

prêt à mettre le prix fort pour acheter sa honte.

dedecorum pretiosus emptor.

Elle n’était pas née de tels parents, la jeunesse

Non his iuuentus orta parentibus

qui fit prendre à la mer la couleur du sang punique,

infecit aequor sanguine Punico

qui brisa Pyrrhus et Antiochus

[3,06,35] Pyrrhumque et ingentem cecidit

le Grand et le funeste Hannibal,

Antiochum Hannibalemque dirum ;

mais c’était la virile postérité de soldats paysans,

sed rusticorum mascula militum

qui avait appris avec la houe sabellienne

proles, Sabellis docta ligonibus

à retourner la glèbe ou rentrer

uersare glaebas et seuerae

sur un ordre de leur austère mère

[3,06,40] matris ad arbitrium recisos

le bois qu’ils venaient de couper, tandis que le soleil

portare fustis, sol ubi montium

déplaçait l’ombre des montagnes et délivrait du joug

mutaret umbras et iuga demeret

les bœufs fatigués, amenant l’heure

bobus fatigatis, amicum

bénie qui voyait son char disparaître.

tempus agens abeunte curru.

Pernicieux, que ne dégrade pas le temps ?

[3,06,45] Damnosa quid non inminuit dies ?

La génération de nos parents, pire que nos aïeux, nous a fait naître

aetas parentum, peior auis, tulit

plus mauvais encore et nous allons donner

nos nequiores, mox daturos

le jour à des enfants qui l’emporteront en perversité

progeniem uitiosiorem.


Voir en ligne : Une lecture de Horace, Ode III 6 | Payer pour les fautes de ses aînés


[1Allusion à la bataille d’Actium.

[2Je modifie la traduction (16/10) : virgo d’abord « jeune fille ».

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