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Virgile, Énéide I v. 561-593 | Le nuage se dissipe

mardi 19 février 2013, par Danielle Carlès

Alors en peu de mots Didon, abaissant son visage, leur dit :

« Quittez toute crainte au cœur, Troyens, bannissez toute inquiétude.

Notre situation difficile et la jeunesse du royaume m’obligent

À prendre ces mesure et à protéger nos frontières par une large surveillance.

[565] Qui pourrait ne pas connaître les Énéades, ne pas connaître la ville de Troie,

Son courage et ses héros, et les embrasements d’une si grande guerre ?

Nous les Puniques n’avons pas d’ordinaire un cœur si insensible,

Et le Soleil n’attelle pas ses chevaux en un point si éloigné de la ville Tyrienne.

Que ce soit la grande Hespérie et les champs de Saturne

[570] Ou le pays d’Éryx et son roi Aceste, quoi que vous choisissiez

Vous aurez mon appui, je vous laisserai partir en sûreté et vous aiderai de nos ressources.

Voulez-vous aussi fixer votre résidence avec moi dans ce royaume ?

La ville que j’élève est la vôtre. Tirez au sec vos navires.

Troyen ou Tyrien, quant à moi je ne ferai aucune différence.

[575] Ah, si seulement votre propre roi, poussé par le même Notus,

Pouvait être avec nous, Énée ! Pour ma part je vais envoyer tout le long des côtes

Des hommes sûrs et ordonner qu’on fouille les confins de la Libye

Au cas où, rejeté par la mer, il cherche son chemin par les forêts et les villes. »

Ces paroles faisaient bondir le cœur du vaillant Achate

[580] Et d’Énée, père des Troyens, et depuis un moment déjà ils brûlaient

De faire éruption du nuage. Le premier, Achate s’adresse à Énée :

« Fils d’une déesse, quel sentiment s’élève en toi à présent ?

Notre sécurité est totale, tu le vois, notre flotte et nos compagnons sont retrouvés.

Un seul manque, mais nous l’avons vu de nos propres yeux se faire engloutir

[585] Au milieu des flots, pour le reste tout est conforme aux prédictions de ta mère. »

À peine avait-il parlé que tout à coup le nuage répandu autour d’eux

Se déchire et se dissipe dans l’éther limpide.

Énée resta sur place, rayonnant d’une claire lumière,

Semblable à un dieu par son visage et ses épaules, car sa propre mère

[590] D’un souffle sur son fils avait embelli sa chevelure, rehaussé son teint

De l’éclat pourpre de la jeunesse et mis à ses yeux une parure de joie,

Ainsi que font les artisans qui ajoutent un ornement à l’ivoire,

Ou quand l’argent ou un marbre de Paros sont recouverts d’or blond.


Lecture avec le texte latin

Alors en peu de mots Didon, abaissant son visage, leur dit :

Tum breuiter Dido, uoltum demissa, profatur :

« Quittez toute crainte au cœur, Troyens, bannissez toute inquiétude.

’Soluite corde metum, Teucri, secludite curas.

Notre situation difficile et la jeunesse du royaume m’obligent

Res dura et regni nouitas me talia cogunt

À prendre ces mesure et à protéger nos frontières par une large surveillance.

moliri, et late finis custode tueri.

[565] Qui pourrait ne pas connaître les Énéades, ne pas connaître la ville de Troie,

565 Quis genus Aeneadum, quis Troiae nesciat urbem,

Son courage et ses héros, et les embrasements d’une si grande guerre ?

uirtutesque uirosque, aut tanti incendia belli ?

Nous les Puniques n’avons pas d’ordinaire un cœur si insensible,

Non obtusa adeo gestamus pectora Poeni,

Et le Soleil n’attelle pas ses chevaux en un point si éloigné de la ville Tyrienne.

nec tam auersus equos Tyria Sol iungit ab urbe.

Que ce soit la grande Hespérie et les champs de Saturne

Seu uos Hesperiam magnam Saturniaque arua,

[570] Ou le pays d’Éryx et son roi Aceste, quoi que vous choisissiez

570 siue Erycis finis regemque optatis Acesten,

Vous aurez mon appui, je vous laisserai partir en sûreté et vous aiderai de nos ressources.

auxilio tutos dimittam, opibusque iuuabo.

Voulez-vous aussi fixer votre résidence avec moi dans ce royaume ?

Voltis et his mecum pariter considere regnis ;

La ville que j’élève est la vôtre. Tirez au sec vos navires.

urbem quam statuo uestra est, subducite nauis ;

Troyen ou Tyrien, quant à moi je ne ferai aucune différence.

Tros Tyriusque mihi nullo discrimine agetur.

[575] Ah, si seulement votre propre roi, poussé par le même Notus,

575 Atque utinam rex ipse Noto compulsus eodem

Pouvait être avec nous, Énée ! Pour ma part je vais envoyer tout le long des côtes

adforet Aeneas ! Equidem per litora certos

Des hommes sûrs et ordonner qu’on fouille les confins de la Libye

dimittam et Libyae lustrare extrema iubebo,

Au cas où, rejeté par la mer, il cherche son chemin par les forêts et les villes. »

si quibus eiectus siluis aut urbibus errat.’

Ces paroles faisaient bondir le cœur du vaillant Achate

His animum arrecti dictis et fortis Achates

[580] Et d’Énée, père des Troyens, et depuis un moment déjà ils brûlaient

580 et pater Aeneas iamdudum erumpere nubem

De faire éruption du nuage. Le premier, Achate s’adresse à Énée :

ardebant. Prior Aenean compellat Achates :

« Fils d’une déesse, quel sentiment s’élève en toi à présent ?

’Nate dea, quae nunc animo sententia surgit ?

Notre sécurité est totale, tu le vois, notre flotte et nos compagnons sont retrouvés.

omnia tuta uides, classem sociosque receptos.

Un seul manque, mais nous l’avons vu de nos propres yeux se faire engloutir

Unus abest, medio in fluctu quem uidimus ipsi

[585] Au milieu des flots, pour le reste tout est conforme aux prédictions de ta mère. »

585 submersum ; dictis respondent cetera matris.’

À peine avait-il parlé que tout à coup le nuage répandu autour d’eux

Vix ea fatus erat, cum circumfusa repente

Se déchire et se dissipe dans l’éther limpide.

scindit se nubes et in aethera purgat apertum.

Énée resta sur place, rayonnant d’une claire lumière,

Restitit Aeneas claraque in luce refulsit,

Semblable à un dieu par son visage et ses épaules, car sa propre mère

os umerosque deo similis ; namque ipsa decoram

[590] D’un souffle sur son fils avait embelli sa chevelure, rehaussé son teint

590 caesariem nato genetrix lumenque iuuentae

De l’éclat pourpre de la jeunesse et mis à ses yeux une parure de joie,

purpureum et laetos oculis adflarat honores :

Ainsi que font les artisans qui ajoutent un ornement à l’ivoire,

quale manus addunt ebori decus, aut ubi flauo

Ou quand l’argent ou un marbre de Paros sont recouverts d’or blond.

argentum Pariusue lapis circumdatur auro.

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