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Virgile, Énéide I v. 441-465 | Le temple de Junon
jeudi 31 janvier 2013, par
Il y avait au milieu de la ville un bois à l’ombre généreuse
Où les Puniques, une fois jetés là par les flots et la tourmente,
En creusant avaient mis au jour le signe que la royale Junon
Leur avait indiqué : la tête d’un cheval fulminant, ce qui devait en faire un peuple
[445] Glorieux à la guerre et abondamment pourvu, de génération en génération.
À cet endroit, en l’honneur de Junon, Didon la Sidonienne bâtissait un temple
Immense et opulent, à la mesure des dons et de la faveur de la déesse.
D’airain était le seuil s’élevant en haut des marches et des traverses
D’airain tenaient le tout, sur leur pivot grinçaient des portes d’airain.
[450] Dans ce bois s’offrit un spectacle extraordinaire qui pour la première fois
Calma toute crainte, là pour la première fois Énée osa espérer
Le salut et reprendre confiance malgré son accablement.
Car, tandis qu’au pied du temple immense il passe en revue chaque détail,
Dans l’attente de la reine, tandis qu’il s’émerveille de la fortune de la ville,
[455] De l’habileté des artisans collaborant entre eux et de la difficulté de l’ouvrage,
Il voit les combats d’Ilion dans l’ordre de leur déroulement,
La guerre dont le bruit s’est désormais répandu dans le monde entier,
Les Atrides et Priam, et Achille, impitoyable envers les deux camps.
Il s’arrêta, et en pleurant : « Quel lieu désormais, dit-il, Achate,
[460] Quel coin de terre n’est pas rempli du bruit de notre malheur ?
Vois, c’est Priam ! Oui, ici la gloire reçoit la récompense qu’elle mérite,
Ici on pleure sur ce qui s’est passé et le sort des mortels touche l’âme.
N’aie plus peur. Cette renommée t’apportera le salut. »
Ainsi dit-il et il repaît son âme des images vaines,
[465] Ne cessant de gémir, le visage baigné d’un intarissable flot de larmes.
Lecture avec le texte latin
Il y avait au milieu de la ville un bois à l’ombre généreuse
Lucus in urbe fuit media, laetissimus umbra,
Où les Puniques, une fois jetés là par les flots et la tourmente,
quo primum iactati undis et turbine Poeni
En creusant avaient mis au jour le signe que la royale Junon
effodere loco signum, quod regia Iuno
Leur avait indiqué : la tête d’un cheval fulminant, ce qui en ferait un peuple
monstrarat, caput acris equi ; sic nam fore bello
[445] Glorieux à la guerre et abondamment pourvu, de génération en génération.
445 egregiam et facilem uictu per saecula gentem.
À cet endroit, en l’honneur de Junon, Didon la Sidonienne bâtissait un temple
Hic templum Iunoni ingens Sidonia Dido
Immense et opulent, à la mesure des dons et de la faveur de la déesse.
condebat, donis opulentum et numine diuae,
D’airain était le seuil s’élevant en haut des marches et des traverses
aerea cui gradibus surgebant limina, nexaeque
D’airain tenaient le tout, autour de leur pivot grinçaient des portes d’airain.
aere trabes, foribus cardo stridebat aenis.
[450] Dans ce bois s’offrit un spectacle extraordinaire qui pour la première fois
450 Hoc primum in luco noua res oblata timorem
Calma toute crainte, là pour la première fois Énée osa espérer
leniit, hic primum Aeneas sperare salutem
Le salut et reprendre confiance malgré son accablement.
ausus, et adflictis melius confidere rebus.
Car, tandis qu’au pied du temple immense il passe en revue chaque détail
Namque sub ingenti lustrat dum singula templo,
Dans l’attente de la reine, tandis qu’il s’émerveille de la fortune de la ville,
reginam opperiens, dum, quae fortuna sit urbi,
[455] De l’habileté des artisans collaborant entre eux et de la difficulté de l’ouvrage,
455 artificumque manus inter se operumque laborem
Il voit les combats d’Ilion dans l’ordre de leur déroulement,
miratur, uidet Iliacas ex ordine pugnas,
La guerre dont le bruit s’est désormais répandu dans le monde entier,
bellaque iam fama totum uolgata per orbem,
Les Atrides et Priam et Achille, impitoyable envers les deux camps.
Atridas, Priamumque, et saeuum ambobus Achillem.
Il s’arrêta, et en pleurant : « Quel lieu désormais, dit-il, Achate,
Constitit, et lacrimans, ’Quis iam locus’ inquit ’Achate,
[460] Quel coin de terre n’est pas rempli du bruit de notre malheur ?
460 quae regio in terris nostri non plena laboris ?
Vois, c’est Priam ! Oui, ici la gloire reçoit la récompense qu’elle mérite,
En Priamus ! Sunt hic etiam sua praemia laudi ;
Ici on pleure sur ce qui s’est passé et le sort des mortels touche l’âme.
sunt lacrimae rerum et mentem mortalia tangunt.
N’aie plus peur. Cette renommée t’apportera le salut. »
Solue metus ; feret haec aliquam tibi fama salutem.’
Ainsi dit-il et il repaît son âme des images vaines,
Sic ait, atque animum pictura pascit inani,
[465] Ne cessant de gémir, le visage baigné d’un intarissable flot de larmes.
465 multa gemens, largoque umectat flumine uoltum.
Messages
1. Virgile, Énéide I v. 441-465 | Le temple de Junon, 8 janvier 2022, 19:27
Magnifique laconisme d’une langue latine dont la traduction française nous restitue la poésie et les rêveries métaphysiques latentes. Dommage qu’on ne l’enseigne plus. Même regret pour le grec ancien.