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Horace, Satires I 7 | Persius de Clazomènes et le Roi de Préneste

lundi 2 janvier 2012, par Danielle Carlès

Comment Persius, citoyen romain mais seulement à moitié, s’est vengé du Roi Rupilius, le proscrit, de ses crachats puants et venimeux, c’est, je crois bien, une histoire connue de tous, de tous ceux qui ont mal aux yeux et de tous les coiffeurs. (1-3)

Ce Persius était riche. Il avait à Clazomènes un établissement de commerce considérable, et une mauvaise affaire avec le Roi. C’était un homme grossier, encore plus détestable que le Roi, arrogant, bouffi d’orgueil, aux paroles remplies de fiel, au point de surpasser un Sisenna ou un Barrus quand il montait sur ses chevaux blancs [1]. (4-8)

Je reviens à ce Roi. Quand il s’avère qu’aucune conciliation entre eux n’est possible - car il en va des chicaneurs comme des héros que la guerre met aux prises : la haine implacable entre Hector, fils de Priam et l’intrépide Achille ne put trouver que dans la mort son ultime dénouement, pour la seule raison que leur courage était exceptionnel, tant l’un que l’autre. Mais si la Discorde s’en prend à deux incapables ou si la guerre se déclare entre des adversaires inégaux, comme dans le cas de Diomède et de Glaucus le Lycien, le plus faible cède le pas à l’autre, et lui fait même des cadeaux. - au moment où Brutus, préteur, se rend maître de l’Asie opulente, le couple formé de Rupilius et de Persius monte au combat, à peu près aussi bien assorti que Bacchius avec Bithus : ils s’élancent avec ardeur dans le prétoire, et font tous les deux un magnifique spectacle. (9-21)

Persius expose son affaire. Des rires s’élèvent partout dans l’assemblée. Il fait l’éloge de Brutus, il fait l’éloge de toute la cohorte. Il appelle Brutus "le soleil de l’Asie", il appelle sa suite "des astres salutaires", ah mais ! sauf le Roi. Lui, il est venu comme "le Chien" [2], la constellation que les paysans détestent. Et il se déversait comme un fleuve en hiver. Bien difficile de le couper, la hache n’y va pas ! (22-27)

Le Prénestin répond à ce flot intarissable de paroles piquantes avec des injures venues du milieu des arbres, en vendangeur rude et invincible, entraîné à rembarrer tout voyageur qui l’interpellerait au passage en lui criant "coucou" [3]. (28-31)

Persius le Grec se voit tout aspergé de ce vinaigre italien. Alors il s’exclame : "Par les grands dieux, Brutus, je t’en prie, toi qui as l’habitude de défaire les rois, pourquoi n’égorges-tu pas celui-là ? Crois-moi, c’est bien un travail pour toi !" (32-35)


[1les chevaux blancs passaient pour être les plus rapides.

[2Désigne l’étoile Sirius ou Canicule, de la constellation du Grand Chien. Quand le lever et le coucher de cette constellation coïncident avec le soleil, on est au plus fort de la chaleur estivale, avec les dégâts que l’on connaît sur la végétation et les vivants.

[3Pline (N. H. XVIII, 249) rapporte une ancienne habitude : ceux qui n’auraient pas fini de tailler la vigne avant l’équinoxe de printemps s’exposent à des moqueries des passants, qui leur lancent le cri du coucou pour les traiter de paresseux et d’incapables. La serpe et le coucou, oiseau de passage, ne doivent pas se rencontrer dans les vignes au printemps. D’autre part la riposte vient "du milieu des arbres", car il s’agit d’une culture de la vigne mariée à des arbres sur lesquels elle grimpe.

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