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Horace, Satires II 3 v. 187-223 | Controverse mythologique

dimanche 24 juin 2012, par Danielle Carlès


Tu interdis, fils d’Atrée, que l’on veuille ensevelir
Ajax, pourquoi ? - Je suis le roi. - Et moi un simple
plébéien. Je ne vais pas chercher plus loin. - Et mes
ordres sont justes. Toutefois si quelqu’un trouve que
je ne suis pas juste je l’autorise à parler et à dire
ce qu’il pense, il ne sera pas poursuivi. - Ô roi, le
plus grand des rois, puissent les dieux t’accorder de
ramener ta flotte à bon port après avoir pris Troie !
Ainsi on va pouvoir poser sa question, et répondre en
plus après ! - Pose ta question. - Ajax est le second
des grands héros juste derrière Achille. Pourquoi est
— il en train de pourrir à l’air libre, quand il s’est
illustré si souvent comme sauveur des Achéens ? Et l’
on offre par là au peuple de Priam et à Priam la joie
de voir sans sépulture celui qui priva tant de jeunes
guerriers d’une tombe sur le sol de leur patrie. - Ce
fou a livré au trépas un millier de brebis en hurlant
qu’il tuait l’illustre Ulysse et Ménélas et moi avec.
— Et toi, à Aulis, quand tu conduis à l’autel au lieu
d’une génisse ta fille chérie et que tu répands de la
farine salée sur sa tête, misérable, conserves-tu ton
bon sens ? — Où veux-tu en venir ? — Eh bien, dans sa
folie quel mal a fait Ajax ? Il a massacré de son fer
des bêtes, il n’a pas agressé son épouse ni son fils.
Il a jeté beaucoup d’imprécations contre les Atrides,
mais il n’a pas porté la main sur Teucer, ni même sur
Ulysse. — Mais moi, c’était pour arracher nos navires
au rivage hostile où ils restaient bloqués ! J’ai été
sage d’apaiser les dieux avec le sang. — Tu veux dire
avec ton propre sang, n’est-ce pas, ô fou furieux ? —
Avec mon sang, mais je ne suis pas un fou furieux ! —
Celui qui conçoit des représentations étrangères à la
réalité et perturbées par la présence d’une intention
criminelle, on jugera qu’il a le cerveau dérangé sans
faire une différence en s’interrogeant s’il est égaré
par la folie ou par la colère. Quand Ajax se livre au
massacre d’agneaux innocents, il a perdu le sens. Toi
quand tu acceptes de commettre un crime de sang-froid
en échange de titres imaginaires, gardes-tu bien tous
tes esprits ? Et ton cœur, quand il gonfle à l’excès,
reste-t-il pur de toute perversion ? Imagine un homme
dont le plaisir serait de promener, dans une litière,
une belle petite agnelle et il lui donnerait, comme à
sa propre fille, des robes, des servantes, des bijoux
d’or, il l’appellerait Rufa ou Pusilla et chercherait
à en faire l’épouse d’un homme de cœur. Le préteur le
frapperait d’interdiction, lui ôterait toute capacité
et on le mettrait sous la tutelle d’un proche sain d’
esprit. Eh bien, maintenant imagine celui qui voue sa
fille en sacrifice à la place d’une agnelle, une bête
sans parole. A-t-il toute sa tête celui-là ? Tu ne le
dirais pas. Ainsi là où la stupide folie s’entache du
crime, c’est là que se trouve la plus parfaite folie.
Qui est souillé d’un crime sera aussi un fou furieux.
Qui s’est laissé prendre au miroitement de la gloire,
Bellone, la sanguinaire, l’enveloppe de son tonnerre.


Voir en ligne : Horace, Satires II 3 | La ronde des fous

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